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petites-aventures-ordinaires.fr

Les petites aventures de Monsieur et Madame tout le monde

Néant

Un jour, je serai poussière. Ça n’aura rien de triste, au contraire. Je flotterai, je roulerai, je ferai des cabrioles. Les manifestations de mon ivresse dépendront du bon vouloir, d’un zéphyr facétieux. Parfois, les rayons du soleil darderont sur moi leur foudroyance et alors, j’apparaitrai, maîtresse de l’invisible, soulevant ma cape de magicienne pour mitrailler des clins d’œil aussi soudains,

Qu’énigmatiques.

Je ne rendrai de compte à personne. Tandis que se lèvera l’aurore, je serai saisie d’un sentiment de nostalgie, qui s’étiolera dans les vapeurs du printemps, saupoudrera la moiteur de l’été, perdurera dans la rougeoyance de l’automne pour s’éteindre tout à fait,

Sous le grelottement de l’hiver.

Je serai la source de la vie, le tarissement du visible, donc du réel. Rien ne me sera dû, je n’attendrai rien. De la vie ni de personne. Je serai une entrave, un contre-courant, le froncement des sourcils, l’éternuement,

Secouant votre oncle si pragmatique.

Votre oncle baraqué,

Mais de faible composition.

Qui peut imaginer le délicat frisson, l’extase, le ravissement, à n’être qu’un atome, un désert, une particule,

Dans le fourmillement de l’univers ?

Ne me répondez pas. Tenez en laisse votre impatience. J’ai le questionnement sur le bout de la langue. La tentation immense, de le laisser,

S’échapper.

Il m’arrive, quand le jour s’éteint, de garder pour moi cette émotion, dans son écrin de naïveté - surannée j’en conviens, surtout lorsque l’on sait que je fus – il n’y a pas si longtemps - un corps, une poigne, un regard, quelques poils épars sur un torse aride, un semblant de virilité pour camoufler ma fragilité.

Lorsque l’on sait que je fus comme vous,

Humain.

Donc voué à l’anéantissement.

Vous êtes incrédule : vous vous croyez invincible, vous êtes persuadé que la mort ne saurait vous embrasser. Comme je vous comprends, et comme je voudrais vous souffler à l’oreille la vérité,

Sur votre condition.

Ça n’aura rien de cruel, ne soyez pas si réticent. Il s’agira simplement de vous rappeler votre état de nature. Celui que la publicité, débilitante, vous aura fait oublier,

En déroulant son fil,

De consumérisme effréné.

Et sur votre front bouillonnant, je placerai la main glacée de ma sagesse, celle que j’ai héritée,

De mes ancêtres.

Je vous l’accorde : certains parmi eux ont tout de l’expiration. Ils vous épouvantent, ou plutôt ils vous font frémir. Ils ont perdu toute capacité à vous insuffler,

Les saillies, les accostages,

De l’encouragement.

Cendres, débris, particules, pollutions : ne les jugez pas trop sévèrement. Ce sont mes cousins, et pour un persifflage un peu trop complaisant,

Je risque ma place,

Au royaume du néant.

Tiendrez-vous votre langue ?

J’en fais le pari.

J’ai toujours eu tendance,

A me montrer,

D’un optimisme,

Démenti,

Par la nature humaine,

Et ses tourments.

 

L’espoir n’est pas vain,

Alors, aujourd’hui mes amis,

Prions.

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